C'était rare que nous étions éveillés aussi longtemps. Ils semblaient avoir ralenti le dosage et les expérimentations sur nous. Nous avions alors commencer à douter de mon identité. Je ne savions pas qui nous étions. D'aussi loin que je me souvenions, nous n'arrivions pas à dire si c'était moi James ou moi Jessie. Nous apprendrions la vérité que bien plus tard. Nous essayions de capter notre reflet dans le verre solide de notre enclos mais il était trop transparent et la lumière trop faible pour avoir quelque chose de distinct.

Aujourd'hui, j'étais dans une cellule toute transparente, les autres autour de nous, étaient toutes vides. Et puis, du mouvement, on ramenait une créature à quatre pattes dans une des cages situé pas loin de nous. On aurait dit un gros félin, et je ne pouvais nous empêcher de penser à notre chat Miaouss. La flamme au bout de sa queue m'intriguait au plus haut point.

- Oh, mon chat nous manque !

Je surpris le gros matou orange nous regarder, il ne nous avait peut être pas encore repérer et semblait nous entendre moi.

- Oh bonjour toi, tu m'entends ?

J'avais toujours rêvé que notre chat soit doué de langage, je ne sais pas ce que j'espérais en parlant à l'animal mais nous n'avions jamais à qui parler, alors juste d'avoir une réaction à notre voix, cela nous ferait passer le temps. Et puis, nous avions vu tellement de bizarreries depuis que nous étions là. Mais je pense que celui que nous avons vu de plus bizarre, n'était pas dans une cage. Ce monsieur en blouse blanche avec ces petites lunettes. A quoi pouvait-il bien s'amuser ce fameux Professeur Jojo ?

J'étais le projet Gémeaux qui faisait partie d'un plus grand truc. Mes souvenirs étaient flous. Je ne savais pas qui j'étions. Mais aujourd'hui, nous étions éveillés et je comptais bien en profiter !

Il nous avait regardé et avait grogné. Mmmh, si je savions parler l'animal, ça sera plus pratique. Je crois que l'une autre de nous sait se faire comprendre des animaux en tout genre. Peut être ais-nous mal entendu.

- Tu t'appelles Graou ? C'est joli comme nom. Moi nous nous appelons...

Ah bah oui, tiens. Quel est notre nom ? Suis-je ma sœur ou mon frère ? J'ai même des fois, des souvenirs que je ne comprends pas.

- Graou, pourquoi tu es ici ? Toi aussi, tu regardes des vidéos ? Regarde ce que je sais faire.

Je m'arrêtai et faisais tourner quelques petites brises dans mes mains avant de relever la tête et de comprendre ma bêtise.

- Ah, oui nous sommes bêtes. Le vent ça ne se voit pas.

Et toi, tu sais faire quoi d'extraordinaire ? Montres moi, petit Graou ! Je suis content de cette journée, elle n'avait jamais été aussi intéressante depuis longtemps. J'ai un nouveau copain !

Ca y'est, nous avions réussi à capter l'attention de Graou. Nous voyions qu'un de ses yeux, mais il était beau. Tout vert. Et puis, d'un coup, il parlait.

- Oh mais tu parles ? C'est un de mes nouveaux pouvoirs.

Et il a un nom. Donc Graou c'est pas son nom. C'était bizarre aussi de s'appeler Graou. Ou même Garou. Mais personne s'appellerait comme ça, voyons !

- Raide Tresse. Oh, il a dû t'appeler comme ça, par rapport à ta belle crinière ! Tu es beau ! Moi le professeur Jojo, il nous appelle Roger. Roger Gémo. Je crois. Mais il est un peu bizarre, et il sent pas hyper bon de la bouche. Mais en vrai, on est des jumeaux.

Il était pas très sympa. Par chance, souvent, c'était un autre monsieur qui venait. Le professeur Connor, je crois. Ou Condor ? En tout cas, il était plus gentil avec nous. Et il était fort, Condor !

- Et pourquoi t'es ici toi ? Ton papa, il t'a donné aussi ?

Mais je ne sais pas ce que nous avions. Nous parlions toujours comme ça avec tout le monde, c'était comme ça que je parlais. Les gens disaient qu'étant arrivé jeune et cloîtré, nous n'avions pas tellement grandi dans notre tête. J'ai une tête normale en taille pourtant. Ce qu'ils comprenaient pas, c'était que quand on me parlait longtemps, mon langage changeait quelque peu.

- Ils parlent de toi comme d'une expérience ratée ou réussie ?

Raide Tresse. Oui, nous avions compris son prénom. Il était assez bizarre ce gros matou. Mais je réussissais à discuter avec lui, et pour ça nous étions trop fort ! Et Graou semblait chercher quelque chose dans ma cellule. On se retournait pour voir ce qu'il pouvait avoir vu mais il n'y avait que nous tout seul avec moi. Et quand je parlais de mon papa, il semblait ne pas être très content. A moi aussi, il me manque alors je comprenons. Mais j'aurais bien voulu savoir si les scientifiques s'occupaient de lui ou non.

- Ah, j'imagine, t'étais peut être un humain qu'ils ont réussie à transformer, si c'est ça, c'est réussie. Nous et les autres, ils semblent plus vouloir trop s'occuper de nous, maintenant.

Etait-ce bien ou mal ? Du moment qu'on reste ici, j'imagine que tout ça n'a aucun intérêt mais c'est la première fois qu'on me laissait discuter avec quelqu'un "d'ailleurs", alors c'était une bonne chose.

- On vient de Costal Del Sol. Enfin, notre père disait que c'était de la partie qui n'était pas tellement au soleil. J'ai jamais compris pourquoi. Et toi, tu dois venir très loin parce que je n'ai jamais vu d'autres comme toi alors, si tu n'es pas humain !


Essayer de se souvenir de Costal Del Sol était compliqué, nos souvenirs étaient quand même fragmentés. Et des fois, il y'avait des images qui ne correspondaient pas du tout à ce que je pensais me souvenir.

- Des fois, j'ai l'impression de venir d'une autre planète. C'est assez étrange... De venir d'ailleurs. Ce que je dis ne dois pas avoir de sens, hein ?

Dans tous les cas, le félin géant semblait ne pas être que doué de paroles mais en savoir bien plus sur la logique expérimentale que nous. Des sujets de prédilection ?

- On nous as dit que l'avantage des jumeaux, c'est que normalement, les résultats devaient être les mêmes. Et que si c'était pas le cas, c'est à cause des romosomes du genre.


Nous récitions ça, comme si on comprenait un traître de mot de l'explication. Mais alors que pas du tout. En gros, si moi ou mon autre jumeau avait quelque chose de différent, ça serait parce que l'un serait une fille et l'autre un garçon. Enfin, depuis quelques temps, ils nous en parlent plus de ça. Mais, nous n'avançions pas plus que ça sur le sujet et le tigre me demandait nos origines. Lui, il venait du Cosmo Canyon

- Oh, le Canyon Cosmo. On l'appelle la Vallée de l'Etoile Déchue. Et il y'a un observatoire là bas. Je l'ai vu dans une de nos vidéos.


A défaut d'avoir connu le monde en le vivant, nous avions quelques informations sur le monde qui nous entoure. Mako, rivière de vie, qui venait s'ajouter à la batteries d'autres activités. Je crois qu'une autre des expériences adorait lire.

- C'est dommage, en tout cas, que tu puisses pas être avec nous. Je ne parle pas beaucoup aux autres encore. Et toi aussi, parfois tu es malade quand tu sens une présence ?

La flamme au bout de la queue de Red XIII était captivante, surtout qu'il ne cessait de la remuer. Miaouss faisait ça lui aussi, je me demande quel effet ça fait d'avoir une queue. Est-ce qu'on peut la bouger comme notre bras ou alors elle bouge sans qu'on puisse la contrôler ? Je nous voyais mal poser cette question au quadrupède. A la place, lui nous demandait nos origines et je pus donner quelques informations sur la sienne.

- Quoi d'autres ? Oh ça a l'air très beau et très grand aussi. Ces grands cailloux énormes de chaque côté. Mais j'ai vu peu d'images là dessus.

En réalité, ces vidéos remplaçaient un quelconque cours de géographie, ne rentrant pas dans les détails, surtout s'ils n'étaient pas flatteurs à la firme locale. Ici, je savais que c'était Midgar mais j'en avais jamais vu que les murs d'ici même si nous avions possibilité de nous balader dans quelques pièces parfois.

Je réfléchissais à d'autres sujets de conversation dans ma tête mais nous n'avions pas l'habitude de converser autant avec des inconnus. Et faire la causette n'était pas un cours que l'on nous enseignait. Pour autant, j'avais l'impression que là, j'apprenais des choses aussi sans trop savoir comment ni pourquoi. Partager ses expériences et ses informations avec un autre, était donc un autre moyen de connaissances. Donc plus on parlait avec des gens différents, plus on en savait ? Et après avoir parlé de ma maladie, qui n'était pas un point commun avec le félin, on entendait des pas se rapprocher. Par réflexe, je sentais que la créature à l'oeil vert était plus réticent à parler. Et c'était moi qu'on venait chercher. Je fis un petit signe de main discret. Peut être allons-nous nous revoir un jour ?

Je n'avais pas non plus la notion de destin. Ni du monde, ni du mien. J'allais encore changer d'ici la prochaine fois. Au revoir Graou !

Je n'allais savoir que plus tard, la vraie origine de tout ça. Et je ne savais déjà pas que mon corps était soumis à quelques changements physiques liés à un profil hormonal fluctuant.

C'était pourtant un peu plus flagrant pour les personnes qui me voyaient. C'est logique et en même temps paradoxal. Etre souvent la personne qui se connaît le moins soi même. Nous nous voyons jamais nous même, nous ne voyons que notre reflet, des images ou vidéos de nous. Nous ne nous entendons jamais comme les autres nous entendent car notre voix n'a pas le même timbre à l'intérieur de nous ou à l'extérieur. Et essayer d'aller décrire le physique ou le caractère de quelqu'un, c'est facile. Ses points forts, ses lacunes, ses particularités. Maintenant, essayez de vous décrire vous-même. C'est plus compliqué. Alors que nous devrions être le sujet que nous maîtrisions le plus.

Dans tous les cas, alors que je retrouvais une vieille connaissance, elle semblait être sceptique à mon égard. Un trou de mémoire ? Ou alors autre chose la troublait ? Il m'avait appelé Roger. Oh, je crois qu'il avait mal compris mon nom. C'est drôle.

- Roger ? Non c'est pas mon nom mais c'est pas grave. Je vois que tu es toujours coincé ici, hein ? Mais ça a l'air d'aller pour toi. Mais j'ai l'impression que tu me reconnais pas, j'ai pas tant grandi que ça pourtant, si ?

J'avais forcément pris quelques centimètres même si de vivre en autarcie au sein d'un laboratoire n'était pas le plus simple pour une croissance normale. J'étais toujours un peu chétive mais aujourd'hui, je semblais être une fille. Je ne le savais pas et ça avait de quoi étonner.

- Je me posais une question, si t'avais la possibilité de partir, tu le ferais ? Et pour aller où ?


Nous n'avions nulle part où aller, je crois...

Était-ce l'acoustique de cet endroit ? Mais ma voix me semblait bien différente que d'ordinaire. A moins que j'ai attrapé un rhume, je ne semble pas avoir de symptômes, pourtant, ni de maux de tête, ni de difficulté à déglutir ou de nez bouché. Maintenant que j'y pense, j'ai un peu mal au ventre depuis ce matin mais quel rapport ?

- Des changements ? J'ai tant changé que cela ?

Peut être que lui non plus n'avait pas reconnu ma voix ? Non, cela semblait physique mais Red XIII mettait ça sur le compte du temps qui nous avait séparé. Peut être sa mémoire lui jouait-elle des tours ? Ou que l'image qui lui restait gravé dans le cerveau était différent de nous ?

Je ne le saurais sans doute pas, c'est pourquoi, je lui posai une question qu'il arrivait de nous poser à moi-même. La captivité avait de ne pas avoir à se poser de questions sur ce qu'il fallait faire, il fallait juste se laisser porter. Mais Red XIII lui retournerait chez lui. C'était le Cosmo Canyon, c'est ça ?

- Rentrer ?

Ce terme. C'était ici chez nous. Moi, je ne sais pas si je retournerai à Costa Del Sol, qu'est-ce qu'y m'y attendrait ? Rien, notre père est sans doute déjà mort.

- Tu as quelqu'un qui t'attends là bas ? De la famille ? Une femme ? Des enfants ? Moi, je crois que nous n'avons plus rien de tout ça. Alors je ne sais pas si on partirait.

Ma question, à laquelle je n'aurais su répondre semblait ne pas être une question facile pour Red XIII non plus. Il savait où rentrer mais pour ce qui l'y attendait. S'il rentrait c'était donc par devoir. Pour protéger la planète.

- Mmh, je comprends le principe de protéger un endroit, car des gens d'autres endroits peuvent l'attaquer. Mais protéger la planète ? Comment c'est possible, il faudrait que d'autres planètes puissent attaquer la nôtre ? Ca se peut ça ?


A moins que sa phrase avait un autre sens après tout, je n'avais pas la science infuse. Et clairement, j'étais à des lieues d'imaginer que l'on pouvait nous même faire endurer les pires choses à notre planète de l'intérieur. Il se gardait bien de nous en parler ici.

En tout cas, le cobaye à quatre pattes semblait déterminé à retourner là bas et que ce serait son point de départ pour la suite. Ca se tient. Enfin, je crois. Vu que je ne peux pas avoir de réel avis sur la chose ou de point de comparaison. Et voilà qu'il essayait de savoir comment m'appeler. Oui, et bien c'est simple. Quoique. Ma bouche ouverte ne laissais sortir aucun son. Pourtant la question était très simple, non ?

Je perdis des forces à essayer de répondre, mon cerveau surchauffait et mes jambes semblaient se dérober sous mon poids, comme si j'étais face à quelque chose d'inconcevable. Je me retrouvais donc assis, les genoux contre mon torse enlacés par mes bras. Mon prénom ?

- Je. Je ne sais pas. Je ne sais pas qui je suis. Je me souviens de Jessie et de James, nous étions des jumeaux mais je ne sais pas lequel on est. Et si je n'étais même pas eux ? Je suis incapable de répondre.

Et ce n'était pas comme si je ne savais pas répondre à une question parce que j'en avais aucune connaissance. Là, c'était comme si c'était physiquement impossible car ça faisait tout dérailler. Un peu comme si on demandait à un ordinateur quelque chose qu'il ne peut pas faire et qu'il plantait. Là, c'était sensiblement pareil.

-Je sais pleins de choses, je me souviens de toi, des autres mais dès que je me demande qui je suis, je ne sais pas. C'est terrifiant.

L'inconnu pouvait paralyser. La peur de ce qui se passe après la vie, par exemple. Et bah moi, c'était ma vie et mon existence elle même car je ne savais pas. J'ai des souvenirs mais il ne me semble pas être les miens.

- Tu crois que c'est normal ? Et si j'étais quelqu'un que je ne connaissais pas ?

Modifier ma mémoire ?

Je m'étais confié à mon voisin de cellule sur les doutes et les questions sur mon existence. Ou plutôt du ressentiment que cela créait en moi. Je ne savais pas grand chose sur moi et c'était inquiétant car j'étais le sujet que je devais avoir le plus sous la main. Mais est-ce qu'il est pas plus facile de comprendre quelque chose dont nous n'avons qu'une vague connaissance qui est unique par rapport à quelque chose qu'on a sous les yeux et qu'à force, on ne comprend de moins en moins.

Alors le cobaye à poil lançait une hypothèse fondé sur sa propre perception. A moins qu'il ne souhaitait simplement que la rassurer. Que cela s'arrangera, que je ne devais pas avoir peur. Je ne sais pas vraiment comment, de mon propre point de vue, les choses pouvaient s'arranger. Après tout les jours se suivaient et se ressemblaient. Peut être qu'après tout, je n'étais qu'un cobaye avec une date de péremption sur la tête. Comme chaque vie. Mais que la mienne, je ne décidai pas quoi en faire par la suite.

Des pas se faisaient entendre. Qui de nous deux ?

- J'espère que la prochaine fois qu'on se verra, tu auras pu sauver la planète alors. Et qu'on aura chacun répondu aux questions qui nous attendent.

J'étais résigné. Verrais-je un jour le Cosmo Canyon. N'étais-je pas aussi en danger que la planète ? Ressentirais-je l'air naturel sur mon épiderme.

Au revoir Raide Tresse...